En gestation depuis 2009, la loi portant réforme du crédit à la consommation (loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, Jo du 2) est la dernière en date d’une longue série de textes visant à protéger les consommateurs (dont notamment les lois Scrivener de 1978 et 1979, Neiertz de 1990 et Borloo de 2003).
S’inscrivant dans une démarche de transposition en droit français d’une directive européenne du 23 avril 2008, elle a pour objectif de renforcer la protection des consommateurs emprunteurs et de lutter contre le surendettement des particuliers.
Un nombre plus important de crédits relèveront désormais de la réglementation protectrice des crédits à la consommation. Et la protection du consommateur qui souscrit un crédit est renforcée tant au stade de l’offre que de la conclusion et de l’exécution du contrat.
À noter
sauf précisions contraires, la grande majorité des dispositions introduites par la loi n’entreront en vigueur qu’à partir du 1er mai 2011, et plus précisément s’appliqueront aux contrats dont l’offre aura été émise après cette date.
Ainsi, la loi élargit le champ d’application de la réglementation du crédit à la consommation. D’une part, elle donne une nouvelle définition du prêteur, plus large que la précédente. Il s’agit de toute personne (physique ou morale) qui consent ou s’engage à consentir un crédit dans le cadre de l’exercice de ses activités commerciales ou professionnelles. Cette nouvelle définition ne fait plus référence au caractère habituel de l’opération. Elle englobe donc désormais non plus seulement les établissements de crédit, mais également tout professionnel consentant un crédit, même de façon occasionnelle, dans le cadre de son activité.
Précision quant à l’emprunteur concerné par la réglementation du crédit à la consommation, il s’agit de la personne physique qui contracte un crédit dans un but étranger à son activité commerciale ou professionnelle.
D’autre part, la réglementation du crédit à la consommation s’applique désormais aux crédits dont le montant est supérieur à 200 € et inférieur à 75 000 € (et non plus inférieur à 21 500 € comme c’était le cas jusqu’à maintenant).
Attention les crédits destinés à financer l’acquisition ou la construction d’un bien immobilier ne relèvent pas de la réglementation sur les crédits à la consommation. En revanche, ceux souscrits en vue de financer des travaux de réparation, d’amélioration ou d’entretien d’un terrain ou d’un bien immobilier entrent désormais dans le champ d’application de cette réglementation lorsque leur montant ne dépasse pas 75 000 €.
Publicité des crédits à la consommation
Depuis le 1er septembre 2010, la publicité en matière de crédit à la consommation est strictement encadrée. Désormais, lorsqu’elle indique un taux d’intérêt ou des informations chiffrées liées au coût du crédit, elle doit impérativement comporter un certain nombre de renseignements, dont le montant total du crédit, le taux annuel effectif global, la nature (fixe, variable ou révisable) du crédit et la durée du contrat de crédit. Ces éléments doivent être mentionnés de façon claire, précise et visible et dans une taille de caractère plus importante que celle utilisée notamment pour le taux d'intérêt promotionnel. Pour les crédits assortis d’une proposition d’assurance facultative, mention du coût de l’assurance en euros et par mois devra également être faite.
La publicité devra aussi contenir un exemple chiffré illustrant le coût du crédit.
Par ailleurs, toute publicité, qu’elle comporte ou non des éléments chiffrés, doit contenir la mention suivante (sauf si elle est radiodiffusée) : « Un crédit vous engage et doit être remboursé. Vérifiez vos capacités de remboursement avant de vous engager. »
Et elle ne doit pas comporter de mentions qui suggèrent qu'un crédit améliore la situation financière ou le budget de l'emprunteur, entraîne une augmentation de ressources, constitue un substitut d’épargne ou accorde une réserve automatique d’argent immédiatement disponible sans contrepartie financière identifiable.
Fiche d’informations
Avant de conclure un crédit à la consommation, le prêteur devra remettre à l’emprunteur une fiche d’informations qui permettra à ce dernier de comparer les différentes offres et de mesurer l’étendue de son éventuel engagement. Ce document sera désormais requis en plus de l’offre de crédit préalablement remise à l’emprunteur. Son contenu sera fixé par décret.
À noter le prêteur encourra la déchéance totale de son droit aux intérêts lorsqu’il ne communiquera pas la fiche d’informations à l’emprunteur.
Explications fournies à l’emprunteur et vérification de sa solvabilité
Outre la fiche d’informations, le prêteur devra fournir à l’emprunteur des explications lui permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière. Il devra ainsi attirer l’attention de l’emprunteur sur les caractéristiques essentielles du crédit proposé et sur les conséquences que ce crédit pourrait avoir sur sa situation financière, notamment en cas de défaut de paiement. Ces explications seront données sur la base des préférences exprimées par l’emprunteur (type de crédit envisagé, etc.).
Avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur devra également vérifier la solvabilité de l’emprunteur à l’aide des informations qu’il aura recueillies auprès de celui-ci et en consultant le fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP).
Délai de rétractation
Une fois l’offre de crédit acceptée, l’emprunteur dispose d’un droit de rétractation lui permettant de renoncer au contrat dans un certain délai.
Ce délai a été modifié par la loi. À l’avenir (1er mai 2011), il passera de 7 à 14 jours révolus (dimanches et jours fériés compris) à compter du jour de l’acceptation de l’offre.
Précision le délai pendant lequel le capital prêté ne peut être versé restera fixé, quant à lui, à 7 jours à compter de l’acceptation de l’offre. Dès lors, s’il exerce son droit de rétractation alors que les sommes lui ont été versées (par exemple le 10e jour), l’emprunteur devra alors rembourser le capital versé et payer les intérêts correspondants, au taux stipulé au contrat, dans un délai de 30 jours après l’envoi de la notification de la rétractation au prêteur.
En outre, la loi précise qu’en cas d’exercice de son droit de rétractation, l’emprunteur ne sera plus tenu par le contrat de service accessoire au contrat de crédit (une assurance par exemple).
Agrément obligatoire de l’emprunteur par le prêteur
Actuellement, les contractants sont libres de soumettre la conclusion d’un contrat de crédit à l’agrément de l’emprunteur par le prêteur. Lorsqu’ils le font, le contrat de crédit ne devient définitif que si le prêteur notifie son agrément à l’emprunteur dans un délai de 7 jours à compter de l’acceptation de l’offre et si ce dernier n’exerce pas son droit de rétractation.
La loi rend obligatoire cette faculté. L’agrément du prêteur sera donc nécessaire pour qu’un contrat de crédit devienne définitif. Sachant que la mise à disposition des fonds au-delà du délai de 7 jours vaudra agrément.
Fiche de recueil d’informations
Lors de la conclusion d’un contrat de crédit sur le lieu de vente ou à distance, le prêteur devra établir une fiche d’informations (un fiche dite « de dialogue ») distincte de la fiche d’informations précontractuelle. Ce document devra comporter les ressources et les charges de l’emprunteur, ainsi que ses prêts en cours le cas échéant. Il devra être soit signé par l’emprunteur, qui certifiera sur l’honneur l’exactitude des données mentionnées, soit validé par lui par voie électronique.
À noter à défaut de signature ou de validation électronique de cette fiche par l’emprunteur, le prêteur encourra la déchéance totale de son droit aux intérêts.
Obligations d’information
Un certain nombre de nouvelles obligations d’information en cours de contrat sont mises à la charge du prêteur.
Ainsi, celui-ci devra informer à l’avance l’emprunteur qui a souscrit un prêt à taux variable de toute modification du taux débiteur (c’est-à-dire du taux d’intérêt). Cette information devra être communiquée par écrit et préciser le nouveau montant des échéances et l’éventuelle modification de leur nombre ou de leur périodicité.
Par ailleurs, le prêteur devra informer une fois par an l’emprunteur sur le montant du capital restant à rembourser, excepté pour les opérations de location-vente et de location avec option d’achat.
Enfin, dès le premier incident de paiement, le prêteur devra informer l’emprunteur des différents risques qu’il encourt (résiliation du contrat de crédit, paiement d’une indemnité…).
La loi ouvre la possibilité au prêteur de percevoir une indemnité en cas de remboursement anticipé du prêt par l’emprunteur. Mais cette faculté est fortement encadrée. L’indemnité ne sera due que pour les montants de remboursement anticipé supérieurs à un seuil fixé par décret. En outre, elle ne pourra ni dépasser un certain pourcentage du montant du crédit (1 % pour un remboursement intervenant plus d’un an avant la fin du contrat de crédit, 0,5 % s’il intervient moins d’un an avant) ni le montant des intérêts que l’emprunteur aurait payés si le contrat de crédit était allé jusqu’à son terme.
Précision l’indemnité ne sera pas due dans les quatre cas suivants : en cas d’autorisation de découvert ou de crédit renouvelable, si le remboursement anticipé est effectué en exécution d’un contrat d’assurance destiné à garantir le remboursement du crédit, ou s’il intervient dans une période où le taux débiteur n’est pas fixe.
Crédit renouvelable
Encore appelé « crédit revolving », le contrat de crédit renouvelable consiste, pour un établissement de crédit, à mettre à disposition d’un client une somme d’argent se renouvelant au fur et à mesure des remboursements du capital.
Parmi les diverses mesures de la loi renforçant l’encadrement du crédit renouvelable, figure l’obligation de recourir, dans tout document commercial ou publicitaire, à la seule appellation « crédit renouvelable » pour désigner ce type de crédit.
Par ailleurs, pour les crédits proposés sur le lieu de vente ou à distance, le prêteur devra être en mesure de proposer à l’emprunteur un autre type de crédit plutôt qu’un crédit renouvelable lorsqu’il s’agira de financer l’achat d’un bien ou d’une prestation de services pour un montant supérieur à un seuil fixé par décret.
En outre, le contrat devra prévoir un remboursement minimal du capital emprunté dans chaque échéance, et ce afin de réduire la durée de ce type de crédit et de mettre fin aux crédits permanents.
Dans l’état actualisé de l’exécution du contrat de crédit que le prêteur a l’obligation d’adresser mensuellement à l’emprunteur, une estimation devra être donnée sur le nombre de mensualités restant dues pour parvenir au remboursement intégral du montant emprunté.
Enfin, avant de proposer la reconduction du contrat, le prêteur devra consulter le FICP de façon à connaître la situation financière de l’emprunteur. Et tous les 3 ans, il devra s’astreindre à vérifier sa solvabilité. En fonction des éléments ainsi recueillis, il pourra être amené à réduire le montant total du crédit, suspendre le droit d’utiliser ce crédit ou même ne pas reconduire le contrat.
Cartes de fidélité associées au crédit renouvelable
S’agissant des cartes de fidélité donnant accès non seulement à des avantages commerciaux mais aussi à une offre de crédit, l’emprunteur devra pouvoir bénéficier de ces avantages sans pour autant être obligé d’utiliser l’option crédit de la carte. Autrement dit, il devra toujours lui être possible de payer comptant avec la carte.
Par ailleurs, l’utilisation du crédit ne pourra résulter que de son accord exprès, exprimé lors du paiement avec la carte ou dans un délai raisonnable après la réception de l’état actualisé d’exécution du contrat. Il en est de même pour les cartes de paiement associées à la fois à un compte de dépôt et à un crédit renouvelable.
Réforme de la fixation des taux de l’usure
Actuellement, le taux de l'usure varie en fonction du type de crédit (renouvelable, amortissable). Ce taux étant très élevé pour le crédit renouvelable et relativement bas pour les autres prêts à la consommation. L’une des conséquences « indésirables » de ce dispositif est qu’il incite les banques à proposer des crédits renouvelables (qui sont très rémunérés) à un maximum de clients (et notamment aux clients à risques) et, inversement, à n’accorder des prêts amortissables qu’aux emprunteurs fortement solvables. Pour permettre une meilleure distribution des crédits, la loi nouvelle prévoit que le calcul du taux de l'usure dépendra, à partir du 1er avril 2011, du montant du crédit et non plus de sa catégorie.
Assurance en matière de crédit immobilier
Depuis le 1er septembre 2010, lors de la souscription d’un crédit immobilier, le prêteur ne peut plus imposer à l’emprunteur d’adhérer à sa propre assurance de groupe pour couvrir les risques décès, invalidité et/ou incapacité de travail. Ce dernier est donc désormais libre de choisir n'importe quelle autre assurance à condition qu’elle présente un niveau de garantie équivalant à celui de l’assurance de groupe proposée par le prêteur.
Précision la décision du prêteur de refuser le contrat d’assurance proposé par l’emprunteur doit être motivée. En outre, il est interdit au prêteur de modifier le taux du crédit mentionné dans l’offre en contrepartie de l’acceptation d’une assurance autre que celle qu’il propose, sauf si le niveau de garantie de l’assurance proposée par l’emprunteur est inférieur à celui offert par l’assurance de groupe du prêteur.
Projet de création d’un fichier recensant les crédits souscrits par un particulier
Actuellement, il existe un fichier national recensant les informations sur les incidents de paiement liés aux crédits accordés aux particuliers. Il s’agit donc d’un fichier « négatif » qui ne fait état que des incidents de paiement.
Il est envisagé d’aller plus loin et de mettre en place un fichier, « positif » cette fois, recensant tous les crédits souscrits par chaque particulier. Sa consultation, ainsi que celle du fichier des incidents de paiement, par les organismes emprunteurs deviendrait obligatoire avant tout octroi de crédit. Un comité chargé de préfigurer la création d’un tel fichier doit remettre un rapport dans un délai de 1 an.
Surendettement des particuliers
Un volet important de la loi est consacré aux procédures de traitement du surendettement des particuliers. Ainsi, depuis novembre 2010, un ensemble de mesures permet d’accélérer ces procédures. En particulier, le délai pour examiner la recevabilité d’un dossier est réduit de 6 à 3 mois et la durée des plans de surendettement de 10 à 8 ans.
Publié le vendredi 19 novembre 2010 - © Copyright SID Presse - 2010