Le nouveau statut d’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL)

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Comment assurer la protection de son patrimoine personnel tout en restant entrepreneur individuel.

On en parlait beaucoup depuis plusieurs mois. C’est désormais chose faite : la loi relative à l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL) a été adoptée au début de cet été. À compter de 2011, les entrepreneurs individuels pourront donc choisir ce nouveau statut destiné à leur permettre de protéger leur patrimoine personnel en cas de difficultés. Êtes-vous concerné par ce dispositif ? Comment y recourir ? Quelles sont ses modalités de fonctionnement ?
Découvrez les caractéristiques de ce nouveau venu dans le paysage des entreprises françaises.

L’objet de l’EIRL

Un grand nombre d’entrepreneurs choisissent d’exercer leur activité en nom propre. Très simple et peu formaliste, ce statut d’entreprise individuelle présente néanmoins un inconvénient majeur : l’entrepreneur individuel répond en principe de ses dettes professionnelles sur l’ensemble de son patrimoine. Lorsque son entreprise connaît des difficultés, son patrimoine personnel est donc directement menacé. Il dispose toutefois d’un moyen de protection : en procédant à une déclaration, dite d’insaisissabilité, devant un notaire, il peut mettre à l’abri de ses créanciers professionnels sa résidence principale ainsi que ses biens fonciers qui ne sont pas affectés à son activité (maison secondaire, appartement…). Mais force est de constater que ce dispositif (qui ne disparaît pas malgré l’avènement de l’EIRL) est très peu utilisé par les entrepreneurs.
Avec l’EIRL, la protection du patrimoine privé de l’entrepreneur devient plus générale. Car cette forme d’entreprise lui permet d’affecter certains biens à l’exercice de son activité et de séparer ainsi son patrimoine personnel de son patrimoine professionnel.

Les entrepreneurs concernés

Tout entrepreneur individuel, qu’il soit commerçant, artisan, professionnel libéral, agriculteur ou auto-entrepreneur pourra opter pour le régime de l’EIRL. Ce statut est même ouvert, à certaines conditions, au mineur, émancipé ou non. Et il pourra être adopté aussi bien lors de la création d’une entreprise qu’en cours d’activité.

La constitution d’une EIRL

L’entrepreneur qui souhaite créer une entreprise sous forme d’EIRL (ou adopter ce statut alors qu’il est déjà installé) doit simplement déposer une déclaration d’affectation au registre de publicité légale auquel il est tenu de s’immatriculer, soit au registre du commerce et des sociétés s’il est commerçant, soit au répertoire des métiers s’il est artisan, soit au greffe du tribunal de commerce du lieu de son établissement principal s’il est professionnel libéral, agriculteur ou auto-entrepreneur.

Cette déclaration doit en particulier comporter un état descriptif des biens nécessaires à l’exercice de l’activité professionnelle (local, matériel, outillage, marchandises…), ainsi que ceux, « utilisés » pour les besoins de l’activité, que l’entrepreneur décide d’y affecter (par exemple un véhicule servant à la fois à un usage professionnel et personnel). Et en cas d’affectation d’un bien commun ou indivis, l’entrepreneur doit justifier de l’accord exprès de son conjoint ou des autres propriétaires indivis.

La nature, la quantité et surtout la valeur de chaque bien affecté doivent y être indiquées. Sachant que jusqu'à un certain montant (à préciser par décret), l’entrepreneur fixe lui-même la valeur du bien. Au-delà, l’évaluation doit être réalisée par un expert (un expert-comptable notamment, un notaire s’il s’agit d’un bien immobilier), l’entrepreneur pouvant toujours retenir une valeur différente. Mais attention, en l’absence de recours à un expert ou en cas de surestimation de la valeur d’un bien par rapport à la valeur proposée par l’expert, l’entrepreneur sera responsable envers ses créanciers, pendant une durée de 5 ans, sur l’ensemble de ses biens, à hauteur de la différence entre la valeur réelle du bien (ou celle proposée par l’expert) et la valeur qu’il aura déclarée.

À noter à partir de 2013, un entrepreneur individuel pourra constituer plusieurs patrimoines d’affectation. Reste à déterminer à quelles conditions et selon quelles modalités : l’entrepreneur devra-t-il procéder à plusieurs déclarations d’affectation, tenir une comptabilité pour chaque patrimoine d’affectation… ? À suivre…

Les effets de l’affectation

Une fois la déclaration d’affectation enregistrée, les biens qui y sont inscrits constituent le patrimoine professionnel de l’entrepreneur (on parle de « patrimoine affecté »), désormais séparé de son patrimoine personnel. Dès lors, et c’est tout l’intérêt du dispositif, le champ d’action des créanciers professionnels devient limité à ce patrimoine affecté ; à l’inverse, les créanciers personnels de l’entrepreneur ne peuvent plus agir que sur son patrimoine personnel. Étant précisé que les créanciers concernés par cette séparation des patrimoines sont uniquement ceux dont la créance est née après le dépôt de la déclaration d’affectation, ainsi que ceux dont la créance est née avant mais à condition que l’entrepreneur le mentionne dans la déclaration et les en informe. Ces derniers ayant alors la possibilité de le contester en justice dans un délai qui reste à déterminer.

Les obligations comptables de l’EIRL

Pour son activité professionnelle, l'entrepreneur en EIRL doit ouvrir un compte bancaire dédié à cette activité professionnelle. Par ailleurs, il doit tenir une comptabilité autonome et la déposer chaque année au lieu d’enregistrement de sa déclaration d'affectation. Les comptes annuels ainsi déposés vaudront actualisation de la composition et de la valeur du patrimoine affecté. Et attention ! En cas de fraude ou de manquement grave à ses obligations comptables ou aux dispositions régissant la composition du patrimoine affecté, l’entrepreneur redevient responsable sur l’ensemble de ses biens.

Le régime fiscal et social de l'EIRL

Le résultat de l’EIRL est, en principe, imposé à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC), des bénéfices non commerciaux (BNC) ou des bénéfices agricoles (BA), selon la nature de l’activité exercée.

Toutefois, l’entrepreneur peut opter pour son assujettissement à l’impôt sur les sociétés (IS). Le bénéfice est alors taxé au taux de 15 % jusqu’à un résultat de 38 120 €, puis de 33,1/3 % au-delà. L’entrepreneur étant alors, en outre, imposé à l’impôt sur le revenu sur les sommes qu’il se verse (rémunération et dividendes).

En cas d’option pour l’IS, seules les rémunérations de l’entrepreneur sont, en principe, soumises aux cotisations et aux contributions sociales. Sinon, ces cotisations sont dues sur la totalité du bénéfice de l’EIRL.

La transmission du patrimoine affecté

L’entrepreneur peut céder ou transmettre gratuitement son patrimoine affecté à une autre personne ou à une société. La cession ou la transmission à une autre personne entraînent le transfert du patrimoine affecté au repreneur avec maintien de l’affectation. La cession (ou l’apport) à une société s’opère, quant à elle, sans maintien de l’affectation. Dans tous les cas, les créanciers de l’entrepreneur dont les droits sont nés avant la cession ou la transmission pourront s’opposer en justice au transfert du patrimoine affecté.

La disparition de l’EIRL

Le patrimoine affecté, et donc l’EIRL, disparaît en cas de renonciation de l’entrepreneur à l’affectation ou en cas de décès de ce dernier, à moins que l’un de ses héritiers ne manifeste son intention de poursuivre l’activité. Les créanciers de l’entrepreneur retrouvent alors la faculté d’agir sur l’ensemble de ses biens. Mais en cas de décès de l’entrepreneur, ou si la renonciation de l’entrepreneur intervient en même temps que la cessation de son activité professionnelle, les créanciers dont la créance est antérieure à la renonciation ou au décès ne conservent pour seul gage que celui qui était le leur au moment de la renonciation ou du décès.

Pour en savoir plus mis en place par les pouvoirs publics en collaboration avec le conseil de l’ordre des experts-comptables, le site internet dédié www.infoeirl.fr donne une multitude de renseignements et de conseils à destination des entrepreneurs

Références
Loi n° 2010-658 du 15 juin 2010, JO du 16

Publié le vendredi 17 septembre 2010 - © Copyright SID Presse - 2010