Le rachat d'une société par l'intermédiaire d'une holding constitue un schéma de reprise de PME couramment utilisé aujourd'hui. Les candidats à la reprise y ont notamment recours lorsqu'ils financent en partie cette acquisition à crédit. Car, grâce à ce montage, nommé LBO (Leverage Buy Out), c'est la société rachetée qui assure elle-même une grande partie du financement de sa propre acquisition.
Dans ce schéma, le repreneur fait racheter la société qui l'intéresse (société cible) par une société holding, spécialement créée dans l'objectif de la reprise. Celle-ci peut revêtir n'importe quelle forme juridique - entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL), société à responsabilité limitée (SARL), société par actions simplifiée (SAS), société anonyme (SA), etc. -, une forme qui est choisie notamment en fonction du nombre et de la qualité des repreneurs (associés opérationnels, investisseurs).
La holding fraîchement créée souscrit alors un emprunt auprès d'une banque pour acquérir les parts ou les actions de la société à racheter. Et ce seront ensuite les dividendes distribués par la société cible qui lui permettront d'honorer les échéances du prêt.
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pour constituer la société holding, il est d'usage que le repreneur réalise un apport de 25 à 30 % de la valeur de la société rachetée. Ainsi, grâce à ce montage, un apport de 250 000 à 300 000 € suffira pour acquérir une entreprise d'une valeur de 1 million d'euros, la somme restante étant empruntée par la société holding.
Outre les facilités de financement que permet ce montage, le rachat d'une société par le biais d'une holding permet de réaliser des économies d'impôts substantielles.
Si la reprise de la société était effectuée directement, les dividendes éventuellement versés par la société rachetée aux associés/repreneurs seraient taxés lourdement à l'impôt sur le revenu : barème progressif de l'IR, ou depuis le 1er janvier 2008, sur option au prélèvement forfaitaire libératoire de 18 % et aux prélèvements sociaux (12,1 % : CSG, CRDS, contribution au financement du RSA et prélèvement social de 2 %).
En revanche, lorsque le repreneur crée une holding pour procéder à la reprise, les dividendes versés à la société holding ne sont pas soumis aux prélèvements sociaux. Et à condition d'opter pour le régime fiscal des sociétés-mères et filiales, ils sont également exonérés d'impôt. Cette option peut être exercée lorsque la holding (société-mère) détient au moins 5 % du capital de la société rachetée (filiale) et que ces deux sociétés sont taxées à l'impôt sur les sociétés. Attention toutefois, pour consolider définitivement cette exonération, les titres de la société cible devront être conservés par la holding pendant au moins 2 ans.
Précision
techniquement, l'option pour le régime des sociétés-mères et filiales n'exonère pas totalement les dividendes. En effet, une quote-part de frais et charges (QPFC) correspondant à 5 % de ces dividendes demeure imposable à l'impôt sur les sociétés. Toutefois, en pratique, dans ce montage, cette QPFC taxable est en principe totalement annulée par les charges d'emprunt supportées par la société holding pour l'acquisition de la cible. Le résultat fiscal imposable de la holding reste donc bien en réalité nul.
Une holding constituée dans le seul but de racheter une société n'a, par hypothèse, pas d'autre source de revenus que les dividendes exonérés versés par la société cible. Elle ne dispose donc d'aucune recette imposable pour absorber ses charges, principalement, les frais financiers découlant de l'acquisition à crédit de la société cible. Elle se retrouve donc titulaire de déficits qu'elle ne pourra jamais imputer.
Mais si, dans le cadre du rachat, la société holding a acquis au moins 95 % des parts ou des actions de la société cible, elle pourra alors optimiser les effets fiscaux de la reprise en optant pour le régime d'intégration fiscale. Cette option permettra en effet à la société cible et à la holding de globaliser leurs résultats et donc de compenser les déficits de la société holding dus aux frais d'emprunt avec les bénéfices générés par la société cible grâce à son activité. Une compensation qui permettra de réduire le montant d'impôt sur les sociétés à acquitter par ces sociétés.
À noter
la réussite de ce montage de reprise dépend de la faculté de la société rachetée à distribuer suffisamment de dividendes pour garantir le remboursement de l'emprunt contracté par la holding.
Les avantages fiscaux du montage ne s'arrêtent pas là. En effet, ces dernières années, les gouvernements successifs ont fait voter des mesures en faveur des repreneurs de PME. Ils ont notamment mis en place au profit des investisseurs une réduction d'impôt sur le revenu et une réduction d'ISF.
Le repreneur qui décide de racheter une société par le biais d'une holding peut, depuis la loi de finances pour 2007, bénéficier, sous certaines conditions, de la réduction d'impôt sur le revenu accordée au titre de la souscription en numéraire au capital initial ou à l'augmentation de capital de PME opérationnelle.
> L'avantage fiscal est ouvert aux contribuables qui souscrivent en numéraire au capital d'une société holding ayant pour objet exclusif de détenir des participations dans une société non cotée, répondant aux critères de la PME communautaire, exerçant une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale, agricole ou financière, dont le siège social est établi en France, dans un État de la Communauté européenne, en Norvège ou en Islande, et imposée à l'impôt sur les sociétés ou à un impôt similaire.
Rappel
la PME communautaire est une société comptant moins de 250 salariés et ayant réalisé un chiffre d'affaires annuel n'excédant pas 50 M € ou disposant d'un total de bilan n'excédant pas 43 M €.
> Si ces critères sont remplis, la souscription au capital de la société holding ouvre droit à une réduction d'impôt correspondant à 25 % des versements effectués au cours de l'année d'imposition, retenus dans une certaine proportion et dans la limite d'un plafond annuel.
À noter
le montant des versements retenus dans la base de la réduction d'impôt est proportionnel aux souscriptions en numéraire investis par la société holding, avant la date de clôture de l'exercice au cours duquel le contribuable a procédé à la souscription, dans la société PME opérationnelle répondant aux critères communautaires susmentionnés.
Pour chaque année d'imposition, les versements effectués au titre de souscriptions éligibles à la réduction d'impôt sont plafonnés à 20 000 € pour une personne célibataire et à 40 000 € pour un couple. La fraction excédentaire est reportée au titre des 4 années suivantes.
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au cours de l'année 2010, un repreneur, seul investisseur, souscrit 300 000 € au capital d'une société holding. Celle-ci investit 80 % de cet apport dans la société PME. Le montant de la souscription pouvant ouvrir droit à la réduction est donc de (300 000 x 80 %) : 240 000 €. Ce repreneur est marié. Il peut donc bénéficier pour l'imposition de ses revenus 2010 d'une réduction de 10 000 € (40 000 x 25 %). L'excédent de son versement de 200 000 € (240 000 – 40 000) donnera droit à la réduction d'impôt dans les mêmes conditions de 2011 à 2014 (soit 4 réductions de 10 000 € chacune).
> La réduction d'impôt n'est définitivement acquise qu'à l'expiration de la 5e année suivant la souscription. Période au cours de laquelle la société holding et le repreneur doivent conserver les titres reçus en échange. À défaut, l'administration fiscale reprendra la réduction d'impôt.
Réduction d'ISF Enfin, de la même façon, les contribuables peuvent prétendre à une réduction d'ISF lorsqu'ils investissent par le biais d'une société holding dans une PME répondant aux critères communautaires que nous venons d'énumérer. Le montant de la réduction est de 75 % des versements effectués dans la limite de 50 000 €, et les titres reçus en échange doivent également être conservés jusqu'au 31 décembre de la 5e année qui suit la souscription. À noter une même fraction de versement ne peut ouvrir à la fois droit à la fois à la réduction d'impôt sur le revenu et à la réduction d'ISF. Toutefois, l'un et l'autre régime peuvent être panachés.
Ce montage pourra être parachevé par la fusion de la société holding et de la société cible. Mais attention à ne pas précipiter les événements car une fusion trop rapide sera regardée d'un très mauvais oeil par l'administration fiscale.
En pratique, ce sont en général les banques qui incitent à procéder à cette fusion très rapidement après la constitution de la société holding ; car une fois les patrimoines de la société cible et de la société holding confondus, c'est la société cible qui devient titulaire de l'emprunt souscrit pour sa propre acquisition. Emprunt qu'elle garantit sur ses propres actifs et qu'elle rembourse directement à partir de sa trésorerie sans passer par la distribution de dividendes. Une situation plus confortable pour les créanciers que sont les établissements bancaires !
Mais la disparition trop rapide de la société holding après sa constitution présente des risques fiscaux, l'administration fiscale recherchant à sanctionner la fusion rapide sur le terrain de l'abus de droit en considérant que ce montage juridique a été motivé par un but exclusivement fiscal. Dans la pratique, la reprise de société étant bien réelle, le fisc a toutefois des difficultés à sanctionner les contribuables sur ce terrain.
L'administration peut également tenter de qualifier la fusion rapide d'acte anormal de gestion. Cette opération peut en effet s'avérer préjudiciable à la société cible qui risque, dans une mauvaise conjoncture économique, de se retrouver étranglée par l'emprunt de son propre rachat.
À noter
si, au contraire, la fusion rapide permet d'assurer la pérennité économique de la cible ou de la renforcer, l'opération ne présentera pas de risque au regard de l'acte anormal de gestion.
Ainsi, si une fusion de la société holding et de la société cible est envisagée, le mieux sera d'attendre que la société holding ait fini de rembourser l'emprunt souscrit pour acquérir la société cible. Si, malgré tout, la situation économique et financière justifie une fusion rapide des deux structures, il conviendra de laisser s'écouler un délai, même court, entre la constitution de la holding et sa fusion avec la société cible. Et le recours à un rescrit permettra de sécuriser l'opération au regard du fisc.
Publié le jeudi 28 janvier 2010 - © Copyright SID Presse - 2010