Un employeur ne peut valablement licencier pour motif économique un salarié que si d’une part tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et d’autre part le salarié n’a pas pu être reclassé dans l’entreprise, ou le cas échéant dans le groupe auquel appartient l’entreprise. Ne pas respecter cette obligation prive le licenciement de cause réelle et sérieuse (ce qui peut valoir à l’employeur de devoir verser au salarié concerné une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse en principe au moins égale à 6 mois de salaire).
Préalablement au licenciement, l’employeur doit donc rechercher un reclassement pour chaque salarié concerné. Une recherche qui doit s’effectuer parmi tous les postes disponibles au sein de l’entreprise et aussi du groupe auquel elle appartient, y compris dans les sociétés du groupe situées à l’étranger.
Précision
la recherche doit s’effectuer parmi toutes les entreprises du groupe dont les activités, l’organisation ou le lieu d’exploitation permettent d’effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.
Or cette obligation était jusqu’alors interprétée très strictement par les magistrats puisqu’en pratique les employeurs se retrouvaient obligés de proposer aux salariés tous les postes disponibles où qu’ils se trouvent (sous réserve que la loi locale permette l’emploi d’étrangers) et ce même à niveau de rémunération très inférieur au Smic.
Aujourd’hui, cette obligation est devenue moins contraignante puisque pour les procédures de licenciement engagées à compter du 20 mai 2010, l’employeur ne doit plus envoyer aux salariés concernés que les seules offres de reclassement à l’étranger qu’ils ont accepté de recevoir. Ainsi, lorsque l’entreprise ou le groupe auquel elle appartient ont des implantations à l’étranger, la loi oblige désormais l’employeur qui souhaite procéder à un licenciement pour motif économique à demander à chaque salarié visé par le licenciement s’il accepte de recevoir des offres de reclassement à l’étranger. La loi encadre ainsi une pratique jusqu’alors toujours refusée par les magistrats de la Cour de cassation (Loi n° 2010-499 du 18 mai 2010, JO du 19).
Le contenu de la demande
En pratique, l’employeur doit adresser à chaque salarié concerné par le licenciement un questionnaire pour lui demander :
- s’il accepte de recevoir des offres de reclassement à l’étranger ;
- et, dans l’affirmative, s’il entend poser des restrictions quant aux caractéristiques des emplois offerts.
La forme de la demande
La loi ne précise pas la forme de la demande. Toutefois, l’employeur a tout intérêt à envoyer ce questionnaire par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou lettre remise en main propre contre décharge datée, de façon à pouvoir prouver qu’il a bien envoyé le questionnaire au salarié et à quelle date il l’a fait.
Le moment de la demande
La loi se contente de préciser que ce questionnaire doit être envoyé préalablement au licenciement. En pratique, il semble logique que l’envoi du questionnaire soit réalisé une fois que le ou les salariés concernés par le licenciement aient été déterminés - autrement dit que l’employeur ait établi l’ordre des licenciements - et qu’il(s) ai(en)t été informé(s) du projet de licenciement, c’est-à-dire convoqué(s) à un entretien préalable.
À noter que la loi ne prévoit aucune sanction spécifique pour les employeurs qui n’enverront pas de questionnaire. Le défaut d’envoi du questionnaire aura toutefois au moins comme conséquence d’obliger l’employeur, comme c’était le cas jusqu’alors, à proposer à chaque salarié concerné toutes les postes de reclassement disponibles à l’étranger, quels qu’ils soient.
Le délai de réponse accordé au salarié
Le salarié doit donner sa réponse dans les 6 jours ouvrables à compter de la réception du questionnaire, en indiquant, le cas échéant, ses éventuelles restrictions quant aux emplois qui pourraient lui être proposés.
Sachant qu’en l’absence de réponse du salarié au terme de ce délai de 6 jours, ce dernier est réputé refuser toute offre de reclassement à l’étranger.
Les conséquences de la réponse du salarié
Si le salarié accepte de recevoir des offres d’emploi à l’étranger, l’employeur doit alors lui adresser les offres disponibles, en tenant compte des restrictions qu’il a éventuellement émises. Ces restrictions peuvent porter en particulier sur la localisation ou la rémunération de l’emploi. Mais le salarié est libre de poser toute autre restriction, la liste n’étant pas limitative.
À noter
en cas de doute sur l’étendue des restrictions émises par le salarié, l’employeur a tout intérêt à lui proposer tout poste susceptible de correspondre de près ou de loin à ses souhaits, de façon à ne pas se voir reprocher par la suite d’avoir méconnu son obligation de reclassement en n’ayant pas proposé au salarié un poste disponible susceptible de l’intéresser.
S’il n’existe aucune offre correspondant aux souhaits du salarié, il faut alors l’en informer par écrit.
À l’inverse, si le salarié a refusé de recevoir des offres à l’étranger, soit expressément en ayant renseigné le questionnaire, soit implicitement en laissant passer le délai de 6 jours, l’employeur est alors dispensé de lui proposer les offres de reclassement à l’étranger disponibles.
Remarque
ce refus de recevoir des offres de reclassement à l’étranger n’exonère bien évidemment pas l’employeur de rechercher un reclassement en France cette fois-ci.
L’employeur doit proposer au salarié sur le point d’être licencié pour motif économique tout emploi disponible relevant de la même catégorie que celui qu’il occupe, ou équivalent, en assurant, le cas échéant, l’adaptation et la formation du salarié.
Et nouveauté : la loi prévoit désormais expressément que cet emploi de même catégorie ou équivalent est obligatoirement assorti d’une rémunération au moins équivalente.
À défaut de tels postes, l’employeur peut toutefois rechercher des emplois de catégorie inférieure, et donc logiquement assortis d’une rémunération inférieure. Le salarié devra alors donner son accord exprès au reclassement.
À noter
s’agissant des emplois situés en France, la loi n’a pas prévu, comme pour les offres à l’étranger, que l’employeur puisse recueillir les vœux du salarié au préalable pour ne lui proposer ensuite que les offres conformes à ses vœux. Il doit donc lui proposer tout poste disponible.
Toute proposition de reclassement doit être faite par écrit afin que l’employeur puisse être en mesure de prouver en justice qu’il a réellement fait une proposition au salarié.
En outre, l’employeur doit informer individuellement chaque salarié concerné. Pour les magistrats, une diffusion par note de service ou par affichage ne permet en effet pas à l’employeur de remplir correctement son obligation de reclassement.
Enfin, l’offre doit être précise et concrète, c’est-à-dire comporter en particulier la localisation du poste, la description des tâches, les niveaux de formation et la rémunération offerte. Ainsi, les magistrats considèrent que ne satisfait pas à son obligation l’employeur qui se contente de proposer un poste mal défini restant à créer, ou encore qui fait une proposition identique à plusieurs salariés sans préciser le montant exact de la rémunération mais uniquement une fourchette en fonction de l'expérience.
Publié le mardi 07 septembre 2010 - © Copyright SID Presse - 2010