Par une convention d'occupation précaire, le propriétaire d'un local confère à une personne (physique ou morale) un droit d'occupation provisoire et précaire de ce local, moyennant le paiement d'une redevance.
Création de la pratique, la convention d'occupation précaire ne fait pas l'objet de dispositions légales particulières. Elle n'en est pas moins un régime de mise à disposition de locaux bien spécifique.
Elle se distingue ainsi du bail commercial. Le titulaire d'une convention d'occupation précaire ne bénéficie pas des droits du preneur à bail commercial (en particulier du droit au renouvellement du bail et à l'indemnité d'éviction en cas de refus de renouvellement).
Elle se distingue également du bail de courte durée, qui ne peut être conclu pour une durée de plus de 2 ans.
Rappel
le bail de courte durée prévu par l'article L. 145-5 du Code de commerce est un régime dérogatoire au bail commercial. Alors qu'un bail commercial ne peut, par principe, être conclu pour une durée inférieure à 9 ans, le bail de courte durée (ou bail dérogatoire) peut être conclu pour une durée maximale de 2 ans. Il est aujourd'hui possible de conclure plusieurs baux dérogatoires successifs, mais la durée cumulée de ces baux ne peut dépasser la limite de 2 ans. Si le locataire est maintenu dans les lieux après cette durée maximale, le bail devient un bail commercial classique.
La convention d'occupation précaire n'est, quant à elle, pas limitée dans le temps et peut durer tant que le motif de précarité ayant justifié sa conclusion perdure.
Cette souplesse en fait d'ailleurs son attrait. Les propriétaires peuvent ainsi y voir un moyen d'échapper aux contraintes du statut du bail commercial.
Cependant, il ne suffit pas d'intituler un contrat « convention d'occupation précaire » pour qu'il en soit valablement un. Et ni la courte durée prévue au contrat, ni les caractéristiques particulières du local, ni encore l'emploi du terme « redevance » plutôt que « loyer » ne sont, à eux seuls, suffisants pour caractériser l'existence d'une convention d'occupation précaire.
En effet, pour qu'il y ait convention d'occupation précaire, deux critères doivent être réunis :
- le droit de l'occupant doit être précaire ;
- et surtout la précarité doit être justifiée par des circonstances particulières indépendantes de la seule volonté des parties.
Ainsi, dans deux arrêts du 29 avril dernier, la Cour de cassation a rappelé que la précarité voulue par les parties ne suffit pas pour donner au contrat la qualification de convention d'occupation précaire, mais qu'il faut qu'il y ait en outre des circonstances particulières indépendantes de la volonté des parties, circonstances les ayant empêché de conclure un véritable bail.
Dans la première affaire, une convention, conclue en 1980, autorisait un garagiste, dans l'attente de la construction d'un nouveau garage, à s'installer dans des locaux appartenant à une société en liquidation judiciaire, à titre précaire et provisoire, pour une durée de 3 mois et dans l'attente de l'accord des créanciers hypothécaires de la société pour la conclusion d'un bail définitif.
En 2005, les locaux avaient été acquis par une société qui avait alors demandé au garagiste, toujours dans les lieux, de les quitter.
Celui-ci avait alors saisi la justice pour se voir reconnaître le bénéfice d'un bail commercial.
Rejetant ses prétentions, la Cour de cassation a estimé qu'en l'espèce, il y avait bien convention d'occupation précaire dans la mesure où tant l'accord des créanciers hypothécaires pour la signature d'un bail que la mise à disposition de locaux dans l'attente de la construction d'un nouveau garage constituaient des circonstances particulières indépendantes de la seule volonté des parties.
Dans la seconde affaire, la Cour de cassation a jugé, en revanche, qu'aucune circonstance particulière indépendante de la volonté des parties ne justifiait que le propriétaire d'un local d'habitation ait consenti à une personne le droit d'occuper ce local à titre précaire, en l'occurrence pour 18 mois, moyennant une indemnité de loyer d'un certain montant, l'occupant s'engageant à quitter les lieux ou à acquérir le local à l'issue de cette période.
Les contrats qui ne réunissent pas les deux critères exigés ne peuvent donc pas être qualifiés de conventions d'occupation précaire.
La précarité du droit de l'occupation peut se déduire d'éléments tels que :
- la durée incertaine de l'occupation ;
- la possibilité pour l'une ou l'autre des parties de mettre fin à la convention sans préavis ;
- la modicité de la redevance d'occupation.
À noter
pris isolément, ces éléments ne suffisent pas à caractériser l'existence d'une convention d'occupation précaire, mais ils peuvent constituer un faisceau d'indices.
Ce critère est déterminant. En pratique, les circonstances particulières indépendantes de la seule volonté des parties tiennent le plus souvent :
- à la situation transitoire de l'immeuble
Exemples
les tribunaux ont ainsi admis l'existence d'une convention d'occupation précaire pour une occupation consentie dans l'attente d'une expropriation, de la reconstruction de locaux détruits par un sinistre ou encore de la réalisation définitive d'une promesse de vente conclue sous condition suspensive de l'obtention du prêt nécessaire à l'achat du local.
- à la situation géographique du local
Exemple
un kiosque mobile et démontable installé dans l'enceinte d'un grand magasin.
- au caractère discontinu et temporaire de l'occupation
Exemple
le contrat accordant à un conservatoire de danse le droit d'utiliser un studio de 9 à 19 heures.
Les conditions de conclusion d'une convention d'occupation précaire ne sont pas réglementées. Le formalisme de la convention d'occupation précaire est libre.
Elle peut ainsi notamment être écrite ou simplement verbale.
Pour éviter les risques de requalification, il est toutefois vivement recommandé d'établir cette convention par écrit et d'y mentionner précisément, en préambule, les circonstances particulières indépendantes de la seule volonté des parties qui en justifient la conclusion.
Publié le vendredi 08 janvier 2010 - © Copyright SID Presse - 2010