Traditionnellement, un épargnant oriente ses placements en fonction de critères financiers, et plus particulièrement de leur rentabilité. Mais depuis quelques années, certains investisseurs retiennent également des critères extrafinanciers pour choisir leurs placements. D'où l'apparition de placements dits « responsables », tenant compte du profit attendu et des convictions personnelles des investisseurs, qui se demandent alors « comment agir au mieux » de leur intérêt personnel et de l'intérêt général.
Deux grandes familles de placements « citoyens » sont actuellement disponibles sur le marché : l'épargne éthique - ou plus justement qualifiée : l'« investissement socialement responsable » - (ISR), et l'épargne solidaire. Bien que souvent associées, il s'agit pourtant de notions distinctes.
L'épargne éthique, ou l'investissement socialement responsable (ISR), a pour objet d'orienter l'épargne des investisseurs vers des sociétés qui concilient développement durable, respect de valeurs sociales, éthiques et/ou environnementales (critères d'acceptation). Plus précisément, Certains fonds éthiques fonctionnent suivant un principe d'exclusion. Aucun investissement n'est alors réalisé dans des sociétés exerçant leur activité dans certains secteurs (armement, tabac...) ou dans des sociétés qui font travailler les enfants par l'intermédiaire de sous-traitants, voire dans des activités qu'ils considèrent comme dangereuses pour l'environnement : OGM, nucléaire. Les produits ISR peuvent prendre la forme de livrets, de contrats d'assurance-vie, mais le plus souvent il s'agit de fonds (OPCVM) investis en actions ou à dominante actions, mais aussi de fonds obligataires.
À noter
ces placements éthiques ne sont pas assortis d'avantages fiscaux spécifiques. Leur imposition varie en fonction du type de placement.
L'épargne solidaire, elle, permet de financer des projets solidaires qui n'auraient pas nécessairement trouvé de financement par les voies financières classiques, notamment bancaires. Ces produits d'épargne solidaire prennent la forme de livrets, de Sicav ou de FCP, d'actions, de contrats d'assurance-vie, de produits d'épargne salariale...
On distingue actuellement deux approches différentes dans le cadre de l'épargne solidaire :
> Les produits d'investissement solidaire : une partie de l'argent épargné est investie à hauteur d'au moins 10 % dans des projets solidaires (des entreprises ayant une forte utilité sociale), comme le financement d'une entreprise d'insertion ou le développement d'activités dans les pays du Sud.
> Les produits de partage : lorsque l'épargnant souscrit un placement de partage, il accepte qu'une partie ou la totalité des revenus générés soit redistribuée à un organisme solidaire. Ainsi, une partie des intérêts est consacrée à des oeuvres solidaires (aide au développement, insertion par l'emploi ou le logement, lutte contre les exclusions, etc.).
En principe, les produits de placement à revenu fixe sont soumis d'office ou sur option à un prélèvement libératoire de l'impôt sur le revenu au taux de 18 %, soit un taux global de 30,1 % prélèvements sociaux inclus.
Afin d'encourager la souscription de produits d'épargne solidaire dite de partage, les intérêts perçus, depuis le 1er janvier 2008, dans le cadre de cette épargne, bénéficient d'un prélèvement à taux réduit égal à 5 %, soit 16 % prélèvements sociaux compris jusqu'au 31 décembre 2008, sur la fraction de ces revenus d'épargne consacrée à des oeuvres d'intérêt général.
À noter
depuis le 1er janvier 2009, le taux global sur ces produits d'épargne dit de partage est de 17,1 % (le taux des prélèvements sociaux passe de 11 à 12,1 %).
Les épargnants « solidaires » restent donc imposés au taux de droit commun sur la partie des revenus qu'ils perçoivent effectivement grâce à cette épargne solidaire.
L'administration fiscale vient de confirmer dans une récente instruction que ce taux réduit ne concerne que les produits de placement à revenu fixe.
Sont notamment concernés par ce taux réduit de 5 % :
- les produits d'obligations négociables et de titres participatifs ;
- les produits des titres de créances négociables et non susceptibles d'être cotés ;
- les produits des bons du Trésor et assimilés, ainsi que des bons de caisse émis par les établissements de crédit ;
- les produits des créances, des comptes courants d'associés et des dépôts (ex. : comptes sur livrets) ;
- les produits des parts des fonds communs de créances ;
- certains produits distribués par les OPCVM.
En revanche, sont exclus du bénéfice du taux de 5 % :
- les produits pour lesquels le régime de l'anonymat fiscal est applicable ;
- les produits des bons ou contrats de capitalisation (assurance-vie) ;
- les intérêts des comptes courants bloqués individuels ;
- toutes les sommes n'ayant pas la nature de produits de placement à revenu fixe, et notamment les produits de placement à revenu variable (dividendes et autres revenus distribués), les gains de cession de valeurs mobilières ou de droits sociaux.
L'administration fiscale rappelle également que l'abandon exprès de revenus ou de produits à des oeuvres d'intérêt général est assimilé à un don ouvrant droit une réduction d'impôt sur le revenu de 75 % (limitée à 495 € pour 2008) ou de 66 % (limitée à 20 % du revenu imposable) selon le type d'organisme bénéficiaire.
> Pour que les produits de placement perçus dans le cadre d'un mécanisme d'épargne solidaire bénéficient du taux réduit de 5 %, les conditions suivantes doivent être remplies :
- l'engagement d'abandon des revenus doit être matérialisé par une convention conclue avec l'établissement payeur, concomitamment à la souscription du produit d'épargne ;
- l'abandon des revenus doit être réalisé au profit d'organismes d'intérêt général mentionnés à l'article 200 du Code général des impôts. Il s'agit notamment des fondations ou associations reconnues d'utilité publique, des oeuvres et des organismes d'intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel...
> De nombreuses précisions pratiques ont été apportées par une instruction administrative.
L'administration précise que lorsque la convention de partage a été conclue avant le 16 octobre 2008, et qu'elle ne mentionne pas l'intégralité des informations prévues (l'identité et les coordonnées des signataires, la dénomination du produit d'épargne souscrit et la nature des produits abandonnés, la liste des organismes bénéficiaires, ainsi que leur adresse et les modalités retenues pour l'abandon des produits acquis au donateur), le contribuable et l'établissement payeur disposent d'un délai de 6 mois à compter du 16 octobre 2008 pour signer un avenant à la convention, reprenant les informations manquantes.
La société de gestion d'un OPCVM dit « solidaire » dispose du même délai pour modifier le prospectus ou la notice d'information de l'organisme, qui tient lieu de convention, si ce document ne mentionne pas l'ensemble des informations requises (la dénomination du produit d'épargne et la nature des produits abandonnés, la liste des organismes bénéficiaires...).
L'administration admet que les établissements payeurs qui n'auraient pas correctement liquidé le prélèvement forfaitaire libératoire dû sur les produits d'épargne solidaire, dite « de partage », perçus antérieurement au 16 octobre 2008, peuvent régulariser leur situation sur la déclaration n° 2777 déposée au cours de l'un des 3 mois suivant la date du 16 octobre, accompagnée des pièces justificatives nécessaires, sans qu'aucune pénalité soit appliquée.
La majorité des établissements financiers propose désormais des produits d'épargne solidaire de tous types, et des financeurs solidaires collectent l'épargne en direct pour soutenir des activités solidaires.
L'épargne solidaire est un peu moins rentable que l'épargne « classique », soit parce que l'épargnant donne une partie de ses intérêts, soit parce qu'une partie du capital est investie sur des projets dont la rentabilité économique est faible. Mais en principe ces placements sont gérés avec le même souci de rentabilité qu'un autre produit financier.
Cependant, il faut tenir compte, pour certains produits, des avantages fiscaux dont bénéficie l'épargnant. Au final, on peut obtenir un rendement globalement satisfaisant, tout en sachant que la préoccupation de l'investisseur dans le cadre de cette épargne tient autant de l'utilité économique et sociale du placement que de sa rémunération.
Publié le lundi 12 janvier 2009 - © Copyright SID Presse - 2009