La loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008 est venue plafonner les délais de paiement pratiqués entre professionnels. Censée améliorer la trésorerie des petites et moyennes entreprises, cette nouvelle réglementation s'applique, sauf dérogations, depuis le 1er janvier dernier.
Voici un point sur les règles désormais en vigueur en la matière au regard notamment des précisions apportées par l'administration (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. – V. sur le site internet http://www.dgccrf.bercy.gouv.fr / rubriques : Services / Documentation / Grands Dossiers / Application de la Loi de modernisation de l'économie / Les délais de paiement).
Dorénavant, les délais de paiement convenus entre entreprises ne peuvent pas dépasser, au choix des intéressés, 45 jours fin de mois ou 60 jours à compter de la date d'émission de la facture (à compter de la date de réception des marchandises dans les départements d'outre-mer, à Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Martin et Saint-Barthélemy).
Étant précisé, selon l'administration, que le délai de 45 jours fin de mois peut se calculer de deux façons. Soit en comptabilisant 45 jours à compter de la date d'émission de la facture, la date limite de paiement tombant alors à la fin du mois au cours duquel expirent ces 45 jours (pratique la plus usuelle). Soit en ajoutant 45 jours à la fin du mois d'émission de la facture.
Exemple
pour une facture établie le 19 janvier 2009, le paiement devra intervenir au plus tard :
- soit le 31 mars 2009 (1re méthode de calcul : 19 janvier 2009 + 45 jours = 5 mars 2009, jusqu'à la fin du mois en cours = 31 mars 2009) ;
- soit le 17 mars 2009 (2e méthode de calcul : 19 janvier 2009, jusqu'à la fin du mois en cours = 31 janvier 2009 + 45 jours = 17 mars 2009) ;
- soit le 20 mars 2009 (19 janvier 2009 + 60 jours).
Lorsque le délai de paiement n'est pas précisé dans les documents contractuels de l'entreprise (conditions générales de vente, bons de commande), c'est alors un délai de 30 jours à compter de la date de réception de la marchandise ou d'exécution de la prestation qui s'applique d'office.
Ce nouveau plafond s'applique à tout producteur, prestataire de services, grossiste ou importateur.
Certains secteurs particuliers demeurent toutefois soumis à des délais spécifiques : 30 jours pour le transport de marchandises ou la location de véhicules, 20 ou 30 jours pour les produits alimentaires, 30 jours pour les boissons alcooliques autres que les vins, 90 jours (ou 60 jours dans certains cas) dans le secteur automobile (en vertu d'un accord adopté en 2007 et valable jusqu'au 31 décembre 2009).
Les nouveaux délais de paiement s'appliquent aux contrats conclus à compter du 1er janvier 2009.
Pour les contrats en cours à cette date, il convient, selon l'administration, de distinguer deux situations.
Si le contrat contient une clause d'indexation qui fait varier le prix automatiquement, il s'agit alors d'un contrat pluriannuel qui n'est pas soumis au nouveau plafond des délais de paiement pendant toute la durée de son exécution.
Si le contrat contient une clause de révision de prix, les parties doivent alors rediscuter et se mettre d'accord sur le nouveau prix : dans ce cas, il s'agit d'une succession de contrats annuels qui sont dorénavant soumis aux nouveaux délais de paiement.
Quant aux contrats qui se renouvellent automatiquement d'une année sur l'autre, sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties (contrats tacitement renouvelables), ils sont également assujettis au plafonnement des délais de paiement, car il s'agit à chaque fois d'un nouveau contrat.
L'entreprise qui soumet un fournisseur à un délai de paiement supérieur au plafond légal se rend coupable d'un comportement abusif et peut être condamnée à des dommages-intérêts. Il en est ainsi par exemple lorsqu'elle demande à un fournisseur, sans motif objectif, de différer la date d'émission d'une facture.
En revanche, toujours selon l'administration, une entreprise serait en droit de demander à ses fournisseurs une compensation financière du fait de la réduction des délais de paiement (par exemple une réduction de prix), sans que cela constitue une pratique abusive.
Le client qui ne respecte pas le délai de paiement convenu est redevable de pénalités.
À cet égard, les entreprises sont libres de fixer le taux des pénalités infligées à leurs clients en cas de retard de paiement. Toutefois, ce taux ne peut désormais être inférieur à trois fois le taux de l'intérêt légal (soit 11,37 % pour 2009), au lieu de 1,5 fois auparavant (soit 5,99 % en 2008).
Notre conseil
le taux de l'intérêt légal varie chaque année. Aussi, pour ne pas à avoir à modifier ses conditions générales de vente et ses factures chaque année, mieux vaut prévoir un taux nettement supérieur à ce minimum légal. D'autant que le nouveau taux de l'intérêt légal est rarement connu avant la fin du mois de janvier...
À défaut de convention particulière en la matière, le taux des pénalités de retard applicable est le taux « Refi » de la Banque centrale européenne, majoré de 10 points de pourcentage (soit 12,5 % actuellement), contre 7 points auparavant.
Lorsque le règlement intervient après la date de paiement figurant sur la facture, les pénalités de retard peuvent être exigées dès le jour suivant cette date, sans que le fournisseur ait besoin d'envoyer un rappel à son client. Les pénalités cessent ensuite d'être dues le jour où les sommes sont portées sur le compte du fournisseur.
À noter
lorsque c'est le délai de 30 jours qui s'applique (voir ci-dessus), le client qui paie en retard peut être sanctionné par une amende pénale qui peut s'élever à 15 000 € pour une personne physique et à 75 000 € pour une société !
Le taux d'intérêt et les modalités d'application des pénalités de retard doivent être mentionnés dans les conditions générales de vente et sur les factures. Les entreprises doivent donc modifier ces documents, si ce n'est déjà fait, dans les meilleurs délais.
Attention
l'entreprise qui ne prévoit pas de pénalités de retard dans ses conditions générales de vente est passible d'une amende pénale.
Secteur par secteur, des accords interprofessionnels peuvent fixer des délais supérieurs au plafond légal. Ces accords doivent toutefois prévoir une réduction progressive du délai dérogatoire vers le délai légal. Et ils ne peuvent être conclus que si des raisons économiques objectives et spécifiques au secteur concerné le justifient (par exemple délais de paiement constatés en 2007, rotation particulière des stocks). Et ils sont applicables jusqu'au 31 décembre 2011 au plus tard, date à laquelle le délai légal s'appliquera ipso facto. À noter ces accords peuvent également choisir de retenir comme point de départ du délai de paiement, non plus la date d'émission de la facture, mais la date de réception des marchandises ou d'exécution de la prestation de services. Mais attention, l'Administration considère que ce choix ne doit pas conduire à un délai final supérieur à 60 jours calendaires ou à 45 jours fin de mois à compter de la date d'émission de la facture. Obligatoirement signés avant le 1er mars 2009, ces accords interprofessionnels sont examinés par l'Administration, puis doivent être validés par décret pris après avis de l'Autorité de la concurrence. Si ce décret le prévoit, l'accord ainsi conclu s'applique à toute entreprise dont l'activité relève des organisations professionnelles signataires.
Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2009, les sociétés dont les comptes annuels sont certifiés par un commissaire aux comptes devront publier des informations relatives aux délais de paiement de leurs fournisseurs ou de leurs clients dans le rapport de gestion à présenter à l'assemblée générale annuelle d'approbation des comptes.
Selon les termes du décret ayant précisé les modalités de cette obligation, il s'agit en pratique d'y faire figurer « la décomposition, à la clôture des deux derniers exercices, du solde des dettes à l'égard des fournisseurs par date d'échéance ».
Observations
cette formule, peu claire, méritera d'être expliquée par les pouvoirs publics, qui devront préciser ce qu'il conviendra d'indiquer dans le rapport de gestion.
De son côté, le commissaire aux comptes devra préciser dans son rapport à l'assemblée générale ses observations sur la sincérité et la concordance des informations mentionnées dans le rapport de gestion avec les comptes annuels de la société. Et il devra transmettre son rapport au ministre chargé de l'Économie s'il fait état, de façon répétée, de manquements significatifs aux dispositions relatives aux délais de paiement.
Publié le mardi 10 mars 2009 - © Copyright SID Presse - 2009