Durant la phase d’épargne, les contrats d’assurance-vie dits rachetables, c’est-à-dire les contrats permettant au souscripteur de récupérer quand il le souhaite les sommes qu’il a épargnées, sont soumis à l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) sur la base de leur valeur de rachat au 1er janvier de l’année d’imposition.
Les autres contrats d’assurance-vie, les contrats « non-rachetables », qui à l’inverse n’autorisent pas le souscripteur à opérer des retraits, sont généralement exonérés d’ISF. Par exception, seules les primes versées après l’âge de 70 ans au titre de contrats souscrits à compter du 20 novembre 1991 sont comprises, pour leur valeur nominale, dans le patrimoine du souscripteur soumis à l’ISF.
Un principe d’imposition simple en apparence qui pose pourtant certaines difficultés d’application dans différentes situations, notamment lorsque le souscripteur d’un contrat d’assurance-vie a désigné un bénéficiaire et que ce dernier a accepté cette désignation.
En effet, le souscripteur d’un contrat d’assurance-vie a la faculté de désigner un ou plusieurs bénéficiaires en cas de décès de l’assuré (généralement le souscripteur et l’assuré sont une seule et même personne). Et lorsque le souscripteur d’un contrat d’assurance-vie désigne un bénéficiaire, ce dernier peut accepter cette désignation. Sachant qu’après avoir donné son accord à l’acceptation d’un bénéficiaire, le souscripteur ne peut plus procéder à un changement de bénéficiaire, ni à des rachats ou à des avances, ni même à un nantissement du contrat, sans l’aval de ce bénéficiaire acceptant.
Précision
afin d’éviter que le bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie accepte directement le bénéfice du contrat en cas de décès de l’assuré auprès de l’assureur sans en informer le souscripteur, la loi du 17 décembre 2007 a clarifié pour l’avenir la conciliation des droits du souscripteur, notamment sa faculté de rachat, avec ceux du bénéficiaire acceptant. Désormais, l’acceptation ne peut intervenir sans le consentement du souscripteur. Cette procédure s'applique toutefois uniquement aux contrats en cours n'ayant pas encore donné lieu à acceptation du bénéficiaire au 18 décembre 2007 et aux contrats souscrits à compter de cette même date.
Depuis le 18 décembre 2007, date d’entrée en vigueur de la réforme sur la clause bénéficiaire (loi n° 2007-1775 du 17 décembre 2007), l’acceptation par le bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie prive le souscripteur de sa faculté de rachat, qui est alors soumise à l’accord du bénéficiaire acceptant. Par conséquent, le titulaire du contrat peut obtenir à tout moment un rachat partiel ou total du contrat avec l’accord écrit du bénéficiaire.
Ce contrat accepté par le bénéficiaire perd-il sa valeur de rachat du fait de cette acceptation ? Autrement dit, l’acceptation du bénéfice du contrat par la ou les personnes désignées bénéficiaires en cas de décès de l’assuré a-t-elle pour conséquence de rendre le contrat non rachetable et donc non imposable à l’ISF ?
Sans surprise, le gouvernement, via une réponse ministérielle (Réponse ministérielle n° 18648, JOAN du 16 février 2010), a précisé que le maintien du droit au rachat du souscripteur, même si l'exercice en est subordonné à l'accord du bénéficiaire, est de nature à conserver le caractère rachetable du contrat d’assurance-vie et donc son imposition à l'ISF. Pour justifier sa décision, l’administration rappelle que le souscripteur conserve sa faculté de rachat prévue au contrat, sous réserve d’obtenir le consentement du bénéficiaire acceptant.
Précision
cette question ne restait en suspens que pour les contrats acceptés depuis le 18 décembre 2007, puisqu’une décision de la Cour de cassation (n° 06-1193 du 22 février) a réglé le sort des contrats d’assurance-vie acceptés avant cette date. Selon la cour, lorsque le droit de rachat est prévu au contrat, le souscripteur, même en présence d’un bénéficiaire acceptant, peut réaliser des rachats sur son contrat sans obtenir l’aval du bénéficiaire, sauf en cas de renonciation expresse du souscripteur à son droit. Ainsi, lorsque le contrat a fait l’objet d’une acceptation avant le 18 décembre 2007, le souscripteur conserve, en principe, sa faculté de rachat, la question de l’imposition ou non à l’ISF ne se pose donc pas.
Résultat : un contrat d’assurance-vie entre dans l’assiette de l’ISF à sa valeur de rachat au 1er janvier de l’année, même si le bénéficiaire a accepté le contrat et quelle que soit sa date d’acceptation.
L’assujettissement d’un contrat assurance-vie à l’ISF est conditionné à la faculté de pouvoir retirer l’épargne accumulée sur le contrat. Dès lors certains contrats d’assurance-vie particuliers ont vu le jour afin de rendre indisponible tout ou partie de l’épargne et ainsi réduire l’assiette de l’ISF. Toutefois, ces derniers mois, l’administration a remis en cause certains de ces montages, en affirmant que ces contrats d’assurance-vie étaient pour certains soumis à l’ISF.
Certains contrats d’assurance-vie dits diversifiés contiennent une clause précisant que les sommes versées sont temporairement indisponibles. Selon l’administration fiscale, la valeur de ces contrats doit être intégrée dans le patrimoine taxable à l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Pourtant, depuis des années, de nombreux experts soutiennent l’inverse.
En effet, ce type de contrat peut stipuler qu’il ne comporte pas de possibilité de rachat, durant une période n’excédant pas 10 ans. Or, en principe, la valeur d’un contrat d’assurance-vie non rachetable n’est pas soumise à l’ISF. Pour motiver sa position, l’administration fiscale met en avant le caractère temporaire de la clause d’indisponibilité, qui n’a pour conséquence que de différer la possibilité d’exercice du droit de rachat, mais qui ne remet pas en cause l’existence d’une créance dans le patrimoine du souscripteur, y compris durant la période d’indisponibilité.
Au final, à l’issue de la période d’indisponibilité, les sommes sont de nouveau disponibles ; dès lors cette indisponibilité temporaire n’aurait pas pour effet de rendre le contrat non imposable à l’ISF.
Ce débat n’est toutefois pas clos et la position retenue par le fisc devrait engendrer de nombreux contentieux, que les juges seraient alors amenés à trancher.
Les contrats d’assurance-vie à bonus de fidélité reposent sur un principe simple : les intérêts générés par l’épargne versée par le souscripteur ne sont pas immédiatement acquis mais affectés par la compagnie d’assurances ou bancaire à une réserve spéciale de « fidélité ». Cette réserve ou bonus de fidélité ne sera alors acquis au bénéficiaire du contrat qu’au-delà d’une période prédéterminée, généralement de 8 ans.
Autrement dit, dans le système du contrat avec bonus de fidélité, le capital est « rangé dans une boîte » et les gains sont « conservés dans une autre boîte ». La garantie de fidélité échappe à l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) puisque seule la valeur rachetable du contrat est imposable à l’ISF. Le bonus de fidélité n’ayant pas de valeur de rachat durant les années d’indisponibilité, sa valeur actualisée ne rentre pas dans l’actif soumis à l’ISF. De ce fait, seule la valeur nominale du contrat, c’est-à-dire les sommes versées sur le contrat, à l’exclusion des frais, doit être déclarée à l’ISF.
À l’issue de la période de fidélité, le contrat sera soumis à l’ISF sur l’ensemble de sa valeur, capital et bonus compris.
Publié le mardi 22 juin 2010 - © Copyright SID Presse - 2010