Lorsqu'un employeur demande à un salarié d'effectuer une astreinte, il lui impose de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure d'intervenir rapidement pour réaliser un travail au service de l'entreprise. En contrepartie de cette réduction de sa liberté d'aller et venir, le salarié doit toutefois bénéficier d'une indemnité spécifique et/ou d'un repos supplémentaire, prévus par la convention collective ou unilatéralement par l'employeur.
Des compensations qui, en ces temps de crise, peuvent devenir d'autant plus appréciables qu'elles sont régulières. Se pose alors la question de savoir si un employeur est libre de diminuer, voire de supprimer, les heures d'astreinte régulièrement effectuées.
À cette question, la Cour de cassation répond que les heures d'astreinte, même effectuées sur une base régulière, ne constituent, en principe, pas un droit acquis pour les salariés qui y sont soumis. Ainsi, non seulement un employeur peut réduire ou supprimer les heures d'astreinte effectuées par toute une catégorie de salariés, mais également réduire ou supprimer les heures d'astreinte effectuées au sein d'une même catégorie professionnelle par certains salariés et non par d'autres.
Mais attention, cette liberté d'organiser les astreintes n'est toutefois pas absolue. D'abord, aucune diminution des astreintes effectuées n'est possible si l'employeur s'est préalablement engagé vis-à-vis d'un salarié à lui assurer un certain volume d'heures d'astreinte. Ensuite, lorsqu'une astreinte est rendue obligatoire par la convention collective ou par le contrat de travail pour tout salarié de l'entreprise qui appartient à une catégorie professionnelle particulière (personnel infirmier ou technicien de maintenance, par exemple), la suppression de l'astreinte ou la réduction du volume d'heures effectuées pourrait être considérée comme un changement du contrat de travail, changement qui nécessite l'accord de chaque salarié. Enfin, l'employeur ne doit pas abuser de sa liberté de gérer les astreintes en détournant ces dernières de leur finalité. Tel pourrait être, par exemple, le cas si la gestion des astreintes était conçue comme un instrument destiné à récompenser, notamment financièrement, certains salariés au détriment d'autres. En effet, dans une telle hypothèse, un salarié s'estimant lésé pourrait alors se plaindre d'une inégalité injustifiée de traitement.
Cassation sociale, 10 octobre 2012 et 22 janvier 2013, n° 11-10454
Publié le vendredi 08 février 2013 - © Copyright SID Presse - 2013